Vers un nouveau modèle de restauration ?
La restauration est un des secteurs les plus touchés par la crise actuelle. Ce week-end, le New York Times se demandait si ce drame n’était pas l’occasion pour le secteur de se renouveler. L’article distingue la situation des chaînes des indépendants, petits et grands. Si les premières ont les épaules assez puissantes pour résister, les seconds sont davantage menacés. Le journal cite même un chiffre de 75% de faillite sur les USA en cas de fermeture prolongée. Mais l'avenir n'est peut-être pas si sombre qu'il n'y paraît.
En lisant la presse internationale, on comprend que les problèmes entendus ici sont récurrents ailleurs. Prenant les grandes villes américaines en exemple, le New York Times soulignait dans un article de ce week-end (Independent Restaurants brace for the unknown) combien le secteur se plaignait avant cette crise. Les auteurs (Kim Serverson & David Yaffe-Bellany) citaient, pêle-mêle, la difficulté de trouver du personnel qualifié et motivé, la lourdeur des charges, le prix des produits de qualité, le coût des locations, l’obligation de gérer 36 choses à la fois, les heures impossibles, etc., remarques souvent entendues chez des restaurateurs dont nous sommes proches, tant dans le secteur du bistrot, de la brasserie ou des tables étoilées. Pour résumer, on entend souvent, là-bas comme ici : « on adore ce que l’on fait, on est passionnés, mais, à l’exception d’une minorité d’acteurs, on crève... »
La crise permettrait-elle de réfléchir à un (des) modèle(s) différent(s) qui demain collera (ont) peut-être davantage à de nouveaux modes de vie ? Une première piste a été/est tentée par certains : les plats à emporter. Si les tentatives des derniers jours sont à prendre comme un réflexe de survie, on peut se demander pourquoi le secteur des plats à emporter (takeout) et des livraisons (delivery) a été depuis son apparition pris en mains par les chaines, les pizzerias, la restauration rapide, et, depuis quelques années, les cantines healthy et bio. Ce secteur est pourtant incroyablement porteur. Il pourrait s’avérer un formidable outil de développement. Il permettrait à beaucoup de restaurateurs d’augmenter (fictivement) le nombre de tables sans devoir agrandir (concrètement) leur restaurant, ni à prendre en mains la logistique (le transport des plats). Certes, une réflexion doit être faite sur l’aménagement intérieur, mais les restaurateurs pourraient y gagner beaucoup.
Une seconde piste touche au renforcement de liens entre chefs et producteurs locaux. On sait que les choses se développent depuis quelques années, avec, d’une part, davantage d’attention de la part des chefs belges envers le local et, d’autre part, la mise en place d’outils de distribution plus efficaces de la part des producteurs. Avec un peu de créativité, on imagine combien ces relations pourraient se renforcer. L’article cite le cas d’un restaurateur qui devait ouvrir au 1eravril un restaurant orienté sur le local : Naked Farmer. Vu la crise, celui-ci s’est transformé en une sorte de « marché fermier digital – digital farmer’s market », où les produits de ces maraichers peuvent être vendus (système de paniers), mais aussi transformés en plats, et vendus, en service traiteurs. On voit dans une ville comme New York et Los Angeles fleurir des applications facilitant les échanges. L’outil nécessite un site web efficace permettant de planifier les commandes et les enlèvements. Mais c'est à réfléchir, d’autant que la démarche inclut une dimension durable à prendre en compte.