Le Grand Café de la Gare cuisine pour les plus démunis.
A Liège, le Grand Café de la Gare, brasserie intéressante que l’on présentait dans La Wallonie à Pleines Dents a initié une action de solidarité envers les personnes les plus précarisées par la crise du Covid-19, mettant ses équipes au travail pour les nourrir. Discussion avec Stephan Uhoda, à l’origine de l’initiative (Photo C. Olsson / En cuisine Grand Café de la Gare)
Comment est née cette initiative ?
Elle est partie d’une réflexion et d’un « momentum » ! J’habite en plein centre de Liège. Le premier dimanche de confinement, je prenais mon déjeuner lorsque, pensant ce qui arrivait, à ma situation, à celles de connaissances et de voisins, je me suis dit que c’était le moment de faire quelque chose de très concret pour les sans-abris et les personnes précarisées qui allaient vivre dans une situation encore plus difficile. Avec le temps et l’habitude, on a appris à vivre avec cette précarité que l’on a bien souvent sous les yeux au centre-ville, sans savoir que faire. Je ne sais d’ailleurs jamais trop comment m’y prendre quand un SDF m’aborde. Donner quelques centimes… Oui, peut-être, mais qu’en fait-il ? En quoi est-ce que je l’aide ? Comment poser un geste qui réponde à une certaine urgence, tout s’inscrivant dans une certaine pérennité. J’ai vite compris que nous traversions une crise comme je n’en avais jamais connue et comme, bien heureusement, le monde n’en connaît qu’une ou deux par siècle. C’était le moment d’agir. Le premier geste a été de se donner les moyens d’une opération de grande envergure, de mettre des moyens financiers suffisants sur la table et de trouver l’équipe pour la réaliser. J’ai d’abord appelé Rudy Gielen, le chef du Grand Café de la Gare dont nous sommes concessionnaires, fermé à cause du confinement et notre responsable d’établissement Pierre Stassart. Ils ont embrayé directement sur l’idée, proposant d’organiser une équipe de cuisine et une organisation logistique en urgence. Il fallait aussi monter cette opération en partenariat avec les ASBL de terrain, le CPAS et les services sociaux de la ville Liège et les aider à rencontrer les nombreuses demandes et urgences qu’ils avaient à traiter. Pour avoir les moyens suffisants et tenir dans la durée notre groupe a décidé de mettre 200.000 € sur un compte spécial « solidarité Grand Café de la Gare ». Nous visions un minimum de150 repas par jour pour démarrer, nous en sommes à 450 aujourd’hui sans compter les nombreuses autres aides alimentaires offertes aux ASBL et institutions en dehors des repas (pain, fruit, laitages, œufs de Pâques en chocolat, petit matériel....) (La photographie ci-dessous illustre la cuisine habituelle du Grand Café, photo faite avant le confinement).
Comment ont réagi les autorités et les associations concernées ?
Elles ont tout de suite compris qu’il s’agissait d’une opportunité à saisir et que nos intentions s’inscrivaient dans une démarche de solidarité et de partenariat et je les en remercie. Nous ne voulions en effet nullement nous substituer à d’autres initiatives. Il existe à Liège un tissu d’asbl et d’institutions qui font un travail remarquable. Nous avons juste voulu réagir face à une situation nouvelle et inédite. Nous aidons comme nous savons le faire avec le Grand Café de la Gare, en préparant des repas et de l’aide alimentaire aux associations de terrain. Nous travaillons ainsi sur le Grand Liège.
Comment les choses se passent-elles ?
Notre chef Rudy est présent, entouré de son second William et d’une partie de l’équipe de base du Grand Café de la Gare qui se relaie. Pierre, manager du restaurant est à la coordination du projet. Des bénévoles nous aident, notamment Lorenzo Baraccato, un de nos anciens chefs qui s’est directement proposé de venir nous aider et des personnes extérieures à l’équipe qui viennent en renfort. Cette initiative collective de l’équipe habituelle, est aussi soutenue par quelques chefs extérieurs, notamment François Tonglet. C’est une équipe de 7 à 10 personnes au quotidien. On prépare un potage et un plat du jour. C’est la cuisine du Grand Café. Ce midi, des boulets à la liégeoise, compote et purée, sont au menu. C’est sans prétention, mais préparé avec attention. J’en profite pour remercier l’Onem et le Ministère des finances qui nous ont soutenus à leur façon, en faisant preuve de souplesse, notamment dans la participation des bénévoles ou la possibilité de défiscaliser les dons.
Qui contrôle cet argent ?
L’argent est sur un compte au nom de Solidarité Grand Café de la Gare. Le montant initial a bénéficié de quelques rentrées apportées par des entreprises et des personnes privées qui ont fait des dons ; je les remercie tous du fonds du cœur car cela a aussi été pour nous un encouragement fantastique Nos fournisseurs nous ont également bien aidés en offrant des produits. Je pense qu’il restera de l’argent à la fin du confinement. Le solde de ce compte sera clôturé à la fin du projet, puis une moitié du montant disponible sera attribué à une/des œuvre(s) dédiée(s) aux personnes précarisées, l’autre moitié sera versé à un fonds de recherche médicale.